Face à l’augmentation du niveau marin, 80 % des îles qui composent l’archipel des Seychelles sont menacées de disparition. Le littoral de ces trésors de biodiversité et de paysage se retrouve ainsi grignoté peu à peu. Si le changement climatique n’a pas été sciemment fait ou entretenu par les humains, certaines actions anthropiques peuvent aggraver ses effets telles que l’urbanisation mal contrôlée, la disparition d’écosystèmes tampons situés à l’interface terre-mer ou la défense lourde et statique du littoral…
Depuis des millénaires, une bonne portion du littoral de la zone intertropicale – à quelques exceptions notables aux Bermudes et en Australie – est protégée par les mangroves, des forêts intertidales composées principalement d’espèces d’arbres appelés palétuviers. Parmi les nombreux systèmes écosystémiques qu’elles procurent à nos sociétés, ces formations arborées peuvent nous aider à limiter les conséquences de l’augmentation du niveau marin, même si le repli stratégique apparaît désormais inévitable. En effet, les mangroves peuvent prograder naturellement vers la mer, c’est-à-dire gagner du terrain. L’accumulation de sédiment au niveau de leurs systèmes racinaires peut donc engendrer une hausse topographique du substrat. Au contraire, leur disparition peut favoriser l’érosion à cause des vagues et des épisodes de tempêtes : le littoral est condamné à céder du terrain sur la mer.
Inscrit dans la droite lignée des solutions fondées sur la nature, prônée notamment par l’UICN [lien article], favoriser le développement de la mangrove peut donc être un moyen à bas coût pour limiter les dégâts. S’il ne s’agit pas d’une solution miracle, elle est une des clefs parmi de nombreuses autres, qui une fois mise ensemble forment un dispositif de défense et de mitigation du risque intéressant, sans qu’il ne faille jouer aux apprentis sorciers avec des phénomènes qui nous dépassent.
Cela, l’ONG Société d’action pour la restauration terrestre des Seychelles (TRASS en anglais) l’a bien compris ! Pour prévenir la dégradation des sols de manière de général et l’érosion côtière, elle a planté 7 500 arbres sur Praslin, deuxième île principale de l’état archipélagique. L’opération concerne 7 sites de cette île et de celle voisine, nommée Curieuse.
Mme Elvina Henriette, une consultante en biodiversité affiliée à l’organisation, explique au journal Seychelles News Agency que TRASS « a été mandatée [en 2017] pour produire et planter des mangroves et d’autres plantes côtières dans le cadre du projet Adaptation-South, basé sur les écosystèmes ».
TRASS a su bénéficier en 2010 d’un financement par l’initiative Mangrove for the future pour un projet de restauration de mangroves dans le nord de l’île Praslin, d’où elle tire notamment sa légitimité pour mener à bien ce genre de chantier. Suite à cela, une surveillance de l’érosion des sols en aval des rivières, au niveau de la mangrove et de la lagune a été mise en place. C’est ainsi tout le bassin versant qui est appréhendé, ce qui permet d’avoir une vision systémique du phénomène d’érosion.
L’ONG a monté sa propre pépinière pour pouvoir fournir les sites de restauration en plants de palétuviers.
Laboudallon – le membre fondateur de TRASS – nous précise quelque chose d’important à propos des sites de restauration : « [Ils] ont été choisis parmi plus de 20 sites car ils répondaient davantage à l’objectif principal consistant à s’adapter au changement climatique par le biais d’interventions sur le terrain, telles que la restauration de mangroves ».
Henriette ajoute que « la région est l’endroit où les collines sont nues et dégradées et ont besoin d’être restaurées afin d’assurer un approvisionnement saine et continu en eau ».
Les projets futurs de TRASS incluent la réhabilitation d’autres bassins versants ainsi que la promotion de pratiques de gestion durable des forêts et des terres respectueuses de la biodiversité, telles que l’apiculture, l’agroforesterie et l’agrotourisme auprès des communautés locales. De quoi améliorer une situation préoccupante sur le long terme.