En collaboration avec la Société zoologique de Londres, WWF publie cette année le rapport « Planète vivante » (Living Planet report) et fait le point sur notre rapport au monde : les populations de milliers d’espèces de vertébrés ont diminué de l’ordre de 60 % entre 1970 et 2014.
Si l’érosion de la biodiversité est un phénomène global, certains territoires présentent des situations plus alarmantes comparées à d’autres. C’est le cas de l’Amérique du sud ou de l’Amérique centrale, figurant parmi les « hot spots » de biodiversité. Là-bas, la perte des populations de vertébrés s’estime à 89 % selon l’étude.
Derrière l’érosion de la biodiversité, la part grandissante des écosystèmes d’eau douce !
Derrière les chiffres globaux, une réalité plus silencieuse existe bel et bien : les écosystèmes aquatiques d’eau douce sont les plus affectés par l’emprise anthropique. Les populations d’espèces dulçaquicoles accusent une chute dramatique de 83 % de leurs effectifs ces 40 dernières années.
Ainsi, le déclin mondial des espèces et des populations reste largement influencé par la mortalité massive des amphibiens, des poissons et des reptiles.
Plusieurs causes participent à expliquer cela. Tout d’abord, la disparition et la dégradation des zones humides, en tant qu’habitats de ces espèces, est un facteur prépondérant. Depuis un peu plus d’un siècle, on estime que 50 % des zones humides mondiales ont disparu.
Le développement d’infrastructures et l’urbanisation au sens large deviennent un problème grandissant. Le développement de barrages – même s’il apporte l’électricité des grandes villes – contribue à la fragmentation des milieux en empêchant une continuité écologique. De nombreuses espèces migratrices sont concernées par ce phénomène. La navigation sur les grands fleuves est également un problème, il serait d’ailleurs un des facteurs explicatifs de la disparition estimée du dauphin de Chine sur le fleuve Yang-Tsé. La pêche menace également des espèces emblématiques telle que l’Anguille ou l’esturgeon européen (Acipenser sturio) pour qui la Garonne est le dernier bastion naturel.

Le modèle agricole productiviste intensif est aussi une cause principale : non seulement pour l’utilisation irraisonnée de produits phytosanitaires, systématique et à grand frais de subventions de la Communauté européenne, mais par une surexploitation des réserves en eau pour l’irrigation de cultures exigeantes en termes de ressource. On peut penser par exemple au maïs cultivé dans des territoires soumis à des risques chroniques de sécheresse dans le sud de la France.
Dans de nombreux pays, le commerce de grenouilles tropicales a favorisé la transmission du champignon aquatique mortel Batrachochytrium dendrobatidis à l’échelle mondiale. Originaire de Corée, il sévit dans presque toute la zone intertropicale. Il est le responsable d’une baisse terrifiante des populations d’amphibiens et de la disparition locale de certaines espèces.
Proportionnellement, les zones humides recèlent bien plus d’espèces différentes par unité de surface que les autres écosystèmes terrestres et marins : on y trouve 1/3 de toutes les espèces de vertébrés connues. À ce titre, ces espaces jouent un rôle indispensable dans la préservation des équilibres environnementaux.
Selon France Nature Environnement, « en 2016, la France répertorie 44 zones humides […] en métropole et en Outre-mer, pour une superficie totale de plus de 3,5 millions d’hectares ». Mais depuis 1950, 50 % de ces zones humides ont disparu. Dans la liste rouge des espèces menacées de France, l’UICN estime qu’une espèce sur cinq des poissons d’eau douce de France métropolitaine est menacée (2009). D’après la liste rouge régionale de Guyane, 166 espèces sont considérées comme menacées sur ce territoire. Parmi elles, 85 % dépendent de près ou de loin du bon état de conservation des zones humides soit 64 espèces d’oiseaux, 8 espèces de mammifères terrestres et marins, 25 espèces de reptiles et d’amphibiens ainsi que 45 taxons de poissons d’eau douce (PRZHT).
Une indifférence cruelle semble frapper ces espèces aquatiques…