Classé en "préoccupation mineure (LC)" par la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) pour sa population mondiale, le flamant rouge - ou flamant des caraïbes - (Phoenicopterus ruber) a depuis longtemps disparu de la Guadeloupe.
Des archives historiques rapportent l'existence de populations nicheuses au XVIIe siècle. Il est fort probable que c'est au cours de ce dernier que l'espèce a depuis disparu du ciel et des zones humides de l'archipel. En effet, c'est dans l'eau et le substrat sablo-vaseux que l'oiseau va trouver les algues et les crustacés dont il se nourrit, devant ainsi sa couleur rougeâtre aux pigments caroténoïdes contenus dans ses proies.

Pourtant, le flamant rouge pourrait réinvestir le territoire que ces ancêtre côtoyaient par le passé grâce à l'intérêt et à la motivation de Jérémy Delolme. Titulaire d'un master II en écologie et éthologie, il travaille sur la faisabilité d'un programme de réintroduction du flamand rouge. Et certaines de ses analyses laissent entendre que ce projet n'est pas insensé. Jérémy Delolme a décelé la présence nombreuse d'artémies (Artemia sp.) et de larves de mouches des saumures (Ephydra sp.) dans la Grande Saline de la pointe des châteaux, un des lieux de présence historiques de l'espèce. Il s'agit de proies de prédilection pour les flamants, permettant de pérenniser leur présence. Les zones humides de cette pointe rocheuse offrent donc des conditions d'accueil idéales selon Jérémy Delolme. La Grande Saline est le principal site ciblé pour la réintroduction de l'espèce.
Mais la pointe des châteaux figure également comme une zone de très forte attraction touristique, parmi les plus importantes de l'archipel guadeloupéen : des questions de fréquentation anarchique des espaces naturels, de manque d'informations de sensibilisation ou de dérangement ont été considérées par Jérémy Delolme, qui pointe les limites de la protection réglementaire du site en faveur de la biodiversité, jugée inefficace. Des réflexions sont en cours afin de définir l'outil réglementaire le plus adapté.

L'espace caribéen a déjà connu des programmes de réintroduction de flamants rouges par le passé. Engagé dès 1992 sur l'île d'Anegada, au nord-est des Îles Vierges britanniques, un projet de réintroduction a permis de passer de 18 individus à plus de 250 en 2013. Un véritable succès qui a tenu compte de la sociabilité de l'espèce.
La future population de flamants "saint-franciscaines" ne devrait pas compter autant d'individus en raison de la taille limitée du site de la Grande Saline. Jérémy Delolme précise qu'une cinquantaine d'individus peut être attendue. Ainsi, les zones humides des Salines de la pointe des Châteaux pourraient voir débarquer prochainement leur nouvel ambassadeur, bien plus "spectaculaire" aux yeux du grand public que des petits limicoles encore inconnus à la population mais pourtant toujours bien présents !