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SITUATION GEOGRAPHIQUE

Le lac Dziani Dzaha (12° 46′ 15″ sud, 45° 17′ 20″ est) est un lac de cratère situé au nord-est de l’île de Petite Terre sur le territoire de Mayotte, et constitue la seule étendue d’eau naturelle de l’île, séparée de seulement 100 m de l’océan Indien. Cette île a la particularité d’être l’endroit de France le plus densément peuplé. En shimaroé, langue indigène locale, dziani signifie lac, dzaha volcan.

Vue aérienne du Dziani Dzaha, avec la Grande Terre de Mayotte au fond ©Franck Bouttemy 2001

Ce lac quasi circulaire  a une superficie de 23 ha. Il présente une couleur verte due à la présence de microorganismes chlorophylliens et des remontées gazeuses sous formes de bouillonnements occasionnels, signes d’une activité hydrothermale encore en cours. C’est un lac à fond plat typique des cratères explosifs avec une profondeur moyenne de 4 m et une fosse de 18 m, actuellement sans relation avec l’océan. Ses caractéristiques physico-chimiques uniques rendent ses eaux impropres à l’utilisation humaine. En effet, sa salinité est plus élevée que celle de l’eau de mer, ses eaux sont particulièrement alcalines, très riches en minéraux dissous (Na+, K+, Mg2+ et Cl-) et en matière organique, avec un pH compris entre 9 et 9.5, sa température varie autour de 30°C, et sa turbidité extrême stratifie ses eaux entre une surface sursaturée en oxygène et une anoxie en dessous de 1.5 m.

Dziani Dzaha, remontées gazeuses ©Christophe Leboulanger

FAUNE ET FLORE

La flore

Les particularités physico-chimiques du Dziani Dzaha limitent fortement sa biodiversité. On trouve du phytoplancton sur toute la colonne d’eau, essentiellement des formes bactériennes, très majoritairement représentées par un seul taxon de cyanobactéries filamenteuses  (Arthrospira sp), ainsi que des stromatolithes (structures calcaires bioconstruites par des cyanobactéries) sur son pourtour, qui apparaissent à l’air libre en saison sèche. Les cyanobactéries qui peuplent ce lac, aussi bien dans la masse d’eau (planctoniques) que sur les stromatolithes (benthiques) étaient pour certaines inconnues jusqu’à ce jour, et de nouveaux genres et espèces ont été décrits très récemment.

Rives du Dziani Dzaha avec stromatolithes ©Christophe Leboulanger

Sur le pourtour du cratère on peut trouver un reliquat de forêt sèche avec des espèces typiques comme le Commiphora arafy également appelé l’arbre mort vivant à cause de son écorce qui se décolle ou le Mimusops coriacea (Nato) qui est un des rares arbres de forêt sèche à avoir des fruits comestibles.

Dziani Dzaha ©Mwanasimba 2004

 

La faune

Le lac contient une communauté stable de bactéries hétérotrophes présentant une faible richesse spécifique, et quelques Protozoaires unicellulaires, mais aucun organisme de grande taille n’y a été trouvé à ce jour.

Eaux du Dziani Dzaha ©Sébastien Turay

On y trouve une très grande abondance de mouches appartenant à la famille des Ephydridae, groupe de diptères ayant une forte affinité pour les milieux salés (lacs, marais salants), dont les adultes et les larves sont capables de se nourrir de cyanobactéries.

Les eaux du Dziani Dzaha ne sont pas favorables au stationnement d’oiseaux, même si quelques individus de passage peuvent y être observés, limicoles et grèbes castagneux (Tachybaptus Ruficollis) principalement.

Grèbe castagneux ©Andreas Trepte www.photonatur.net

HISTOIRE

Les cratères de Petite Terre, deux ouverts sur l’océan et le Dziani Dzaha, forment le site de Moya, vestige d’une activité volcanique récente (sans doute entre 4000 et 7000 ans). Petite Terre, plus récente que Grande Terre, est née d’un épisode volcanique qui a percé la barrière corallienne déjà formée. Les cratères sont nés de la rencontre violente entre le magma ascendant à très haute température et les eaux océaniques, à une période ultérieure où ces terres étaient immergées.

Les eaux du Dziani Dzaha seraient issues de l’eau de mer puis fortement modifiées sous l’effet des contraintes géologiques et de l’activité microbienne. Sa communauté microbienne, unique et d’une grande stabilité, en fait un écosystème autorégulé qui est actuellement étudié comme présentant de grandes analogies avec ce qui est imaginé pour les océans du Précambrien (basé sur ses caractéristiques des rapports entres isotopes stables 12C et 13C dans l’eau et les sédiments).

Looking to understand the deep past in Dziani Lake (Mayotte-France) - Scientific Mission # 1 from SUR UNE ILE on Vimeo.

Depuis 2010 à l’initiative de chercheurs de l’IRD plusieurs études ont été entamées sur le Dziani Dzaha pour décrire la diversité microbienne du lac, ses métabolismes et les conséquences pour la compréhension du cycle du carbone. Actuellement une dizaine de laboratoires et d’instituts de recherche français travaillent sur le Dziani Dzaha.

 

 

ENJEUX ET MENACES

Le Dziani Dzaha avec son cratère pratiquement intact représente l’édifice volcanique le mieux préservé de Mayotte. Sa conservation est donc avant tout un enjeu géologique et scientifique. Isolé de toute source de pollution et de toute pression humaine, il a pu être estimé en bon état lors de l’état des lieux de 2007.

Dziani Dzaha, vue aérienne ©Christophe Leboulanger

Les abords du lacs, soumis à une forte pression démographique, sont un refuge pour la forêt sèche naturelle, progressivement rognée au profit d’une agriculture vivrière essentiellement  composée de manioc et de bananes.

 

PROTECTION

Le Dziani Dzaha appartient au Conservatoire du Littoral et est une zone aquatique protégée, avec un accès libre mais à usages limités..

Le site de Moya est cogéré par le Conservatoire et le Conseil Général, avec un plan de gestion mis en place en 2011 pour une période de 10 ans afin de contrôler l’impact agricole sur le site et d’assurer la protection des tortues sur les plages des cratères ouverts sur l’océan.

Dziani Dzaha ©Mwanasimba 2008

 

 

VISITER LE SITE

Ces espaces sont vivants et fragiles, merci de respecter la réglementation et d'adopter un comportement respectueux des paysages, de la flore, de la faune et de la tranquillité des lieux.

Ne laissez aucune trace de votre passage.

Un sentier de grande randonnée (GR1) traverse le site du nord au sud sur un linéaire d’environ 8km. Il permet de rejoindre l’aire de stationnement du Dziani-Dzaha au départ de l’aéroport de Pamandzi.

Un sentier d’interprétation géologique du Dziani-Dzaha et de Moya, réalisé en partenariat avec le BRGM, se compose de deux équipements :

  • Un sentier balisé d’environ 1 heure de marche qui suit le tour du cratère.
  • Le belvédère de Moya, situé à environ 30 minutes de marche du Dziani-Dzaha (parcours fléché), permet l’observation des maars et de la presqu’île de Moya.

Si vous souhaitez venir sur le site pour observer la ponte de Tortues marines, vous pouvez contacter :

Direction de l’environnement et du développement durable du conseil général de Mayotte

ZI Nel Kawéni

97600 Mamoudzou

tél : 02 69 64 99 21  ou le : 06 39 10 11 49  ou le : 06 39 06 79 08.

SOURCES

Cellamare M, Duval C, Drelin Y, Djediat C, Touibi N, Agogué H, Leboulanger C, Ader M, Bernard C. (2018) Charaterization of photoautotrophic microorganisms and description of new cyanobacteria isolated from the saline-alkaline crater-lake Dziani Dzaha (Mayotte, Indian Ocean). FEMS Microbiol Ecol (2018) 94: fiy108 DOI:10.1093/femsec/fiy108

Gérard E, De Goeyse S, Hugoni M, Agogué H, Richard L, Milesi V, Guyot F, Lecourt L, Borensztajn S, Joseph MB, Leclerc T, Sarazin G, Jézéquel D, Leboulanger C, Ader M. (2018) Key role of Alphaproteobacteria and Cyanobacteria in the formation of stromatolites of Lake Dziani Dzaha (Mayotte, Western Indian Ocean). Frontiers Microbiol  9: 796

Leboulanger C, Agogué H, Bernard C, Bouvy M, Carré C, Cellamare M, et al. (2017) Microbial Diversity and Cyanobacterial Production in Dziani Dzaha Crater Lake, a Unique Tropical Thalassohaline Environment. PLoS ONE 12(1): e0168879. doi:10.1371/journal.pone.0168879

Graviou P (2010) Valorisation du patrimoine géologique de Mayotte : un éventail d’actions complémentaires. Géologie de la France, n° 1, 2010, p. 57-63

Traineau H., Sanjuan B., Brach M., Audru J.-C. (2006) – Etat des connaissances du potentiel géothermique de Mayotte. BRGM/RP-54700-FR, 81 p., 31 ill., 2 ann